L’arrivée d’une nouvelle année s’accompagne immanquablement d’une quantité d’études, d’inventaires et pour les plus courageux de prévisions. En 2013, si les formes et les détails divergent, les observateurs semblent s’accorder sur une impression globale : le bilan de l’activité économique de 2012 n’est pas particulièrement réjouissant et le manque de visibilité pour l’année à venir est au moins aussi marqué qu’il y a douze mois. Pour toute personne un tant soit peu proactive, ce constat amène la question suivante : comment gagner en compétitivité ? Ou, autre formulation appréciée des médias, comment retrouver « le chemin de la croissance » ?
Ces derniers mois, la notion de compétitivité a été abordée à maintes reprises, le plus souvent sous un angle macro-économique et en réaction à la publication du rapport Gallois. Ce dernier soulignait l’importance d’une démarche d’intelligence économique nationale (lire notre article Rapport Gallois et pacte de compétitivité). Mais sous un angle micro-économique, un certain nombre de questions restent en suspens. Au cours des semaines à venir, nous tenterons de répondre à deux d’entre elles : de quelles options disposent les entreprises pour maintenir ou développer leur position concurrentielle ? Quel soutien l’intelligence économique peut-elle leur apporter ?
Mis en difficulté sur leur(s) marché(s), les dirigeants peuvent opter pour une recherche de compétitivité défensive (réduction des coûts ou des prix) ou offensive (développement de nouveaux produits ou marchés). Au premier abord, la solution de la réduction des prix et/ou des coûts peut paraître plus facile, mais sa viabilité est limitée : tôt ou tard la concurrence s’aligne ou dépasse les efforts effectués, notamment si l’entreprise fait face à une concurrence internationale. Nous nous concentrerons donc sur les solutions dites offensives que nous pouvons regrouper sous le terme « business development », ou « développement d’affaires » pour les plus francophiles. Nous parlerons de développement international, d’innovation, de coopétition et verrons quels sont les apports de l’intelligence économique en la matière. Commençons aujourd’hui avec une première forme de business development : l’export.
Une première solution : l’export
Pourquoi choisir l’export ? Les raisons sont multiples, interdépendantes et relatives à la nature et à l’environnement de la société. En voici quelques-unes :
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Accroître les ventes d’un produit
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Dégager des économies d’échelle
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Prolonger le cycle de vie d’un produit
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Rentabiliser sa production
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Limiter sa dépendance à une zone géographique (limiter la dépendance d’un produit à une zone géographique)
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Freiner l’expansion d’un concurrent
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Renforcer sa notoriété
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…
Avant toute démarche le dirigeant doit fixer ses objectifs, qui constituent le socle de toute stratégie.
Se lancer à l’export : les grandes étapes
Avant de s’engager hors de sa zone de confort, où les pièges sont nombreux et la visibilité limitée, il est nécessaire de planifier consciencieusement sa stratégie d’exportation et de business development dans ce cadre.
Voici une liste (simplifiée) des principales étapes de la démarche :
1. Diagnostic de l’entreprise
En premier lieu, le dirigeant doit mener une évaluation objective des :
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ressources financières
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ressources humaines
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capacités de production
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capacités de transformation de l’organisation
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capacités de transformation du produit
Rôle de l’IE
Il s’agit de définir si l’entreprise est prête ou non à exporter et d’identifier les éventuelles actions à mener pour l’y préparer. Le responsable doit mener un audit interne en s’appuyant sur un outil classique de l’analyse stratégique : la matrice SWOT. A noter : la collecte d’information auprès des différents managers est un facteur décisif de l’audit. L’organisation de la remontée d’informations internes fait partie des compétences dont doit disposer un responsable IE.
2. Choisir le ou les pays de destination
Le choix du marché cible ne peut se faire sans une première étude comparative. Même si le dirigeant a une idée spontanée du pays dans lequel ils souhaite exporter, une évaluation et une comparaison chiffrées sont préférables. Par exemple : la Chine semble être un excellent pays de destination pour vendre du vin, mais êtes-vous sûr que l’opération ne serait pas plus profitable en Corée du Sud ?
Rôle de l’IE
La collecte et le traitement de l’information sont les principales fonctions de l’IE. Le responsable pourra procéder à la sélection en s’appuyant sur un tableau comparatif pondéré. Le responsable doit identifier les pays à comparer (se limiter dans le nombre de pays afin de garantir un travail en profondeur), lister les critères de sélection (taille du marché, degré de maturité, intensité concurrentielle…), les pondérer, collecter l’information par pays, noter les pays en fonction de chaque critère, pour attribuer une note globale à chaque pays et obtenir un classement. La rencontre et l’interrogation d’experts permettra une analyse plus fine.
3. Mobiliser une équipe
Exporter demande du temps et des compétences précises (compétences linguistiques, culturelles, juridiques, logistiques…). Il faudra donc recruter en interne ou en externe des collaborateurs adaptés.
Rôle de l’IE
Le processus de recrutement et d’évaluation peut-être optimisé grâce à l’IE (consulter nos articles sur l’emploi).
Une fois l’équipe mobilisée, il est indispensable de la sensibiliser à l’intelligence économique. Les collaborateurs doivent être les capteurs mais également les gardiens de l’information d’entreprise. Ils doivent être conscients que les pratiques de renseignement diffèrent d’un pays à l’autre et faire de la sécurité informatique, matérielle et humaine leur priorité.
4. Réaliser une étude de marché approfondie
Du niveau d’information peut dépendre le succès de la démarche. Une fois le pays choisi, l’entreprise devra approfondir les recherches et mener une étude de marché détaillée. Elle doit notamment connaître :
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Taille du marché réel et potentiel
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Perspectives d’évolutions du marché
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Segmentation du marché
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Attente des prospects
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Spécificités culturelles
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Taux de pénétration du marché
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Nombre d’entreprises étrangères présentes
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Etat de l’offre
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Nature de la concurrence
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Réseaux de distribution
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Contexte politique
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Etat des infrastructures
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Barrières tarifaires et non tarifaires
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Démarches administratives
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Réglementation
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…
Rôle de l’IE
Une fois de plus, l’IE apporte une palette d’outils pour améliorer la collecte, le traitement et l’analyse de l’information. Parmi eux, la gestion des sources humaines, permettant l’acquisition d’informations non ouvertes (et donc moins accessibles à la concurrence) lors de visites du pays ou de salons internationaux.
5. Définir sa stratégie marketing
A la lumière du diagnostic interne et de l’étude de marché, le dirigeant doit décider :
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des modifications à apporter ou non à son produit
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de son prix de vente
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de son mode de distribution (intégré ? sous-traité ?)
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de sa stratégie de communication
6. Définir sa stratégie de protection de la propriété intellectuelle
Avant d’exporter ses produits, l’entreprise doit s’assurer que ses derniers sont protégés de la contrefaçon, mais également d’accusation de contrefaçon. La stratégie à adopter dépend du système juridique local, de l’état de la concurrence et des ressources financière disponibles.
Rôle de l’IE
La protection du patrimoine informationnel de l’entreprise fait partie intégrante de l’IE. De nombreux étudiants choisissent d’enrichir leur formation juridique par une formation complémentaire en IE. Ces futur professionnels sont capables d’analyser les risques informationnels et de construire une stratégie de protection adaptée. C’est à cette double compétence que doivent faire appel les entreprises avant d’entamer leur démarche d’internationalisation.
7. Choix des partenaires
Difficile de pénétrer seul un marché sur lequel notre notoriété est faible voire nulle. Il est important pour remédier à défaut de s’appuyer sur des réseaux d’influence et des partenaires fiables, capables de renseigner, d’orienter et de promouvoir l’image de l’entreprise auprès de ses prospects.
Rôle de l’IE
A cette étape, un travail de cartographie des acteurs en présence est à mener. Les relations et jeux d’influence devront être identifiés pour permettre à l’entreprise de concentrer son action sur les partenaires les plus pertinents. Une due diligence devra être conduite pour chaque partenaire sélectionné, afin d’éviter d’associer la réputation de l’entreprise à des acteurs douteux ou financièrement instables.
Une fois les partenaires ciblés, une campagne de communication et de lobbying peut être entamée : elle vise à promouvoir les intérêts de la société auprès des acteurs décisionnaires.
8. Prospection
L’étape suivante consiste en la constitution et l’exploitation d’une base de prospection. Le responsable peut s’appuyer sur ses recherches précédentes ainsi que des annuaires et fichiers constitués par des organismes spécialisés (CCI, Ubifrance…). Parallèlement, des documents de prospection (plaquettes de présentation de l’entreprise, fiches produits, catalogues…) doivent être mis en place.
Rôle de l’IE
Pour augmenter l’impact de cette démarche commerciale, le responsable peut mettre en place un dispositif de veille : une veille commerciale pour détecter des opportunités de marché, une veille concurrentielle pour surveiller les mouvements de la concurrence et une veille marché pour surveiller les tendances de fonds et le contexte macro-économique.
9. Rédaction des contrats
Cette étape est principalement juridique. Il s’agit principalement de déterminer si l’entreprise exercera son activité dans le cadre du droit français ou non, des moyens et délais de paiements qu’elle imposera à ses clients, des modalités de livraison (incoterms) et du service après-vente qu’elle assurera.
Rôle de l’IE
Le travail juridique devra être orienté par une analyse des risques. Le responsable devra évaluer la potentialité et le degré de nocivité de différentes situations, telles que le défaut de paiement, le défaut de livraison, ou le vol de marchandises.
A travers une palette de solutions multiformes, l’IE constitue à la fois une aide à la décision, un outil de détection des risques et des opportunités, une protection de l’information stratégique de l’entreprise et un outil d’influence. Deux des facteurs clés de succès d’une stratégie d’export étant la maîtrise de l’information stratégique et l’anticipation des risques, l’IE offre indéniablement un avantage concurrentiel à ceux qui se l’approprient dans leur stratégie de business development.
Article rédigé par Lucie Loubet
Sources :
Le Business Development ou développement d’affaires, c’est quoi ? – Novancia
Développement commercial en temps de crise – Le Cercle des Echos
Comment optimiser l’organisation de votre développement commercial ? – Prospactive
Itinéraire Export : Exporter, Pourquoi ? – Cadrexport
Se lancer à l’export : Le roadbook de l’exportateur – Journal du Net
Guide à l’exportation – La Société de développement international de Lanaudière (SODIL)